Culte du dimanche 30 mars 2025
Textes
Luc 15,11-32
1 corinthiens 1,10-18
Luc 15, 11-32 (NBS)
Prédication
Robin Sautter , Pasteur
Laetare
Les disputes/les conflits
Prédication en lien avec le thème du processus synodal de l’EPUdF pour 2025-2026 :
« Eglise universelle : témoigner en vivant la diversité ».
« La parole est puissance de Dieu », voilà l’affirmation essentielle, voilà la conclusion de cette introduction de Paul. Il rappelle que la parole de Dieu est au dessus de toute parole humaine et que cette parole est agissante.
Mais le verset sur lequel j’aimerai insister avec vous ce matin, c’est plutôt le verset 10 :
1 Corinthiens 1,10 : Je vous exhorte, frères, par le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, à tenir tous un même langage, et à ne point avoir de divisions parmi vous, mais à être parfaitement unis dans un même esprit et dans un même sentiment.
Est-il possible d’être parfaitement unis dans un même esprit et dans un même sentiment ?
Est-il même souhaitable d’être unis dans un même esprit et dans un même sentiment ?
Sommes-nous appelés à être penser tous la même chose ? A ressentir tous la même chose ?
Il y a un risque d’instrumentalisation tout à fait tyrannique de ces paroles de paroles. Et à l’heure où certains dirigeants dans le monde n’hésite pas à brandir le christianisme pour justifier des discours nationalistes, plaçant leur nation au dessus des autres, il me semble essentiel de travailler ensemble à ce que l’évangile dit sur l’unité et la diversité.
A l’heure où nous paroisses se sentent toutes petites face aux enjeux du monde, à l’heure où nous serions tentés à notre tour de nous replier sur nous même par peur d’un monde qui nous semble de plus en plus compliqué, il est essentiel de puiser ensemble à la source.
A l’heure où notre société se clive de plus en plus, les pacifistes contre les militaristes, les capitalistes contre les anti-capitalistes, les pro-palestiniens contre les pro-israeliens, les occidentaux contre les orientaux, les jeunes contre les vieux, nous ne pouvons pas nous mettre la tête dans le sable en se disant, ça va passer !
Et le texte de ce matin, en nous projetant dans la communauté de Corinthe à l’époque de Paul, nous amène à repérer un mécanisme bien humain qui, lorsque qu’il cherche l’unité de manière passionnelle, génère de la division !
Regardons donc cette communauté de Corinthe à laquelle Paul s’adresse. On comprend que dans celle-ci il y a des « divisions » (= littéralement le texte parle de « fissures ») et des « disputes »
* Le parti de Paul : ceux qui ont été convertis après le discours de Actes 18, lorsque Paul était hébergé chez Priscille et Aquilas. Premières conversions à Corinthe, conversion de non juifs. Donc de personnes qui n’ont pas la culture juive. Actes 18 nous parle aussi d’une vision que Paul reçoit pendant la nuit et dans lequel Dieu dit « j’ai un peuple nombreux dans cette ville ». (deuxième épître la plus longue)
* Le parti d’Appolos : un prédicateur appréciait pour son éloquence. Il fascine ses auditeurs par son érudition (il connaît et cite parfaitement les écritures). On ne sait pas grand chose sur lui mais à chaque fois que Paul en parle c’est plutôt avec estime et affection.
* Le parti de Pierre : Paul fait ici référence à Simon Pierre, le chef des apôtres à Jérusalem, qui s’était nous raconte le livre des actes plutôt spécialisé dans le baptême de croyants d’origine juive. On imagine donc des tensions entre les chrétiens d’origine païenne et les chrétiens d’origine juive.
* Le parti de Christ : groupe qui pose problème aux exégètes. Si on reste dans la même logique des groupes précédents il décrirait le groupe de ceux qui ont été baptisé par Jésus lui-même ? Cela paraît peut probable, vu la distance culturelle et géographique, que ce groupe soit conséquent. A mon avis Paul peut ici vouloir désigner des chrétiens qui en se croyant plus fidèle à l’évangile ne se révendique d’aucune étiquète mais qui, ce faisant, génère malgré eux une chapelle de plus et concours tout aussi bien que les autres à la division du corps du Christ. Nous connaissons bien cela aujourd’hui avec les chrétiens « non dénominationnels » et la plupart des églises évangéliques. Paul les mis ici dans le même panier !!
Avec ce dernier groupe finalement nous comprenons tout de suite à quel point cette réalité de la division nous parle.
Nous la connaissons par la diversité des dénominations dans une même ville (à Romans : les catholiques, les pentecôtistes, les darbystes, les apostoliques arméniens, les darbystes, les réformés, etc…) mais aussi bien sûr au sein de chacune de nos communautés. Et c’est bien de cela dont parle Paul. De l’existence de tensions, de fissure au sein de la communauté de Jérusalem.
On sent chez l’apôtre Paul une inquiétude sincère vis-à-vis de cette communauté. Il a peur qu’elle explose.
Une communauté bouillonante, pleine de conflits, de personnalités qui tente de s’imposer, je crois que cela aussi nous le connaissons bien. Quelque soit la paroisse ou l’Eglise locale que vous avez connu, il est fort probable que vous ayez déjà fait cet expérience d’une communauté qui éclate ou qui se retrouve au bord de l’éclatement.
Et comme Paul nous avons peur de la division, nous avons peur du conflit. Pourquoi ? Tout simplement car fondamentalement nous avons besoin d’une communauté, d’un collectif sur lequel nous appuyer. Que ce soit dans les cadre d’une conviction politique, dans le cadre du travail, dans le cadre de la famille et bien sûr dans le cadre de l’Eglise, l’humain aspire à des relations paisibles car il est un être de relation. Seuls nous ne sommes rien. Seuls nous n’avons aucune chance de survie. Seuls nous perdons toute opportunité de connaître le bonheur.
La parabole du fils prodigue est interessante car aussi bien la famille que l’Eglise : pas facile pour des vieux paroissiens fidèles de tuer le veau gras pour quelqu’un qui a délaissé l’église pendant des années !
1 Corinthiens 1,10 : Je vous exhorte, frères, par le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, à tenir tous un même langage, et à ne point avoir de divisions parmi vous, mais à être parfaitement unis dans un même esprit et dans un même sentiment.
L’apôtre Paul répète cette exhortation à toutes les sauces dans bien des épîtres. Et paradoxalement il montre ainsi que les disputes et les tension au sein de chaque communauté étaient déjà bien présentes à l’époque.
Le deuxième chapitre du livre des actes qui nous présente une communauté chrétienne idéal est donc à comprendre plus comme une direction à viser qu’une origine vers lequel il faudrait avoir un regard nostalgique.
Une fois que nous avons dit cela il nous faut regarder avec un peu plus d’attention le texte grec de ce verset 10 :
– même langage (= culture)
– même intelligence = « nous » (= reflexion, esprit rationnel, plus technique)
– même sentiment. Plus précisément même « gnômé »
1) faculté de connaître (= la gnose) liée à une étude approfondie, bon sens, mais aussi disposition de l’âme (d’où « sentiment»)
2) opinion/avis. Je dirai pour ma part « état d’esprit ».
Paul est donc très exigeant quant à la notion d’unité.
Ces trois unités je les vois plutôt comme une direction à prendre, un horizon, pour ne jamais se contenter des divisions.
Et surtout en donnant ces trois axes, on s’oblige à se parler sur tous les plans.
Multiplions les occasions de discussions et n’étouffons pas nos émotions.
Après, mais Paul le développe plus dans l’épître aux Romains, il y a l’idée que ce qui est impossible pour nous est possible pour Dieu, l’idée que en reconnaissant que nous n’arrivons pas à cette unité par nous même nous nous plaçons sous le regard du Christ, qui lui assure la pleine unité entre nous.
Cf l’histoire du jeune homme riche : ce qui n’est pas possible pour nous, l’est pour Dieu !
En attendant, il nous revient de faire de notre mieux pour suivre les trois axes donnés par Paul au Corinthiens : même langage, même intelligence, même « état d’esprit » .
Dimanche 6 avril 2025
10h30 Culte