Culte du dimanche 10 août 2025
Textes du jour
Ézékiel 33. 10-16
Hébreux 11. 1
Luc 12. 48

Sois sans crainte, petit troupeau, car votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume.
« Vendez ce que vous possédez et donnez-le en aumône. Faites-vous des bourses inusables, un trésor inaltérable dans les cieux ; là ni voleur n’approche, ni mite ne détruit. Car, où est votre trésor, là aussi sera votre cœur.
« Restez en tenue de travail et gardez vos lampes allumées. Et soyez comme des gens qui attendent leur maître à son retour des noces, afin de lui ouvrir dès qu’il arrivera et frappera. Heureux ces serviteurs que le maître à son arrivée trouvera en train de veiller. En vérité, je vous le déclare, il prendra la tenue de travail, les fera mettre à table et passera pour les servir. Et si c’est à la deuxième veille qu’il arrive, ou à la troisième, et qu’il trouve cet accueil, heureux sont-ils !
« Vous le savez : si le maître de maison connaissait l’heure à laquelle le voleur va venir, il ne laisserait pas percer le mur de sa maison. Vous aussi, tenez-vous prêts, car c’est à l’heure que vous ignorez que le Fils de l’homme va venir. »
Pierre dit alors : « Seigneur, est-ce pour nous que tu dis cette parabole ou bien pour tout le monde ? » Le Seigneur lui dit : « Quel est donc l’intendant fidèle, avisé, que le maître établira sur sa domesticité pour distribuer en temps voulu les rations de blé ? Heureux ce serviteur, que son maître en arrivant trouvera en train de faire ce travail ! Vraiment, je vous le déclare, il l’établira sur tous ses biens. Mais si ce serviteur se dit en son cœur : “Mon maître tarde à venir” et qu’il se mette à battre les garçons et les filles de service, à manger, à boire et à s’enivrer, le maître de ce serviteur arrivera au jour qu’il n’attend pas et à l’heure qu’il ne sait pas : il le chassera et lui fera partager le sort des infidèles.
« Ce serviteur qui connaissait la volonté de son maître et qui pourtant n’a rien préparé ni fait selon cette volonté recevra bien des coups ; celui qui ne la connaissait pas et qui a fait de quoi mériter des coups en recevra peu. A qui l’on a beaucoup donné, on redemandera beaucoup ; à qui l’on a beaucoup confié, on réclamera davantage.”
Prédication
Pierre Bécheret
Évangile de LUC ch 12 , v 33
« Faites-vous des bourses qui ne s’usent point ! . . . »
Cette injonction adressée par Jésus à ses disciples nous ébranle et nous interroge sur le sens que nous donnons à notre vie. Jésus met en garde ses disciples contre l’accumulation de richesses terrestres.
Dans le contexte biblique, la bourse symbolise le réceptacle de tout ce que l’on possède, autrement dit un lieu où l’on passe son existence à se constituer un patrimoine pour assurer ses vieux jours. Or, le début du même verset 33 que nous avons cité est radical « Vendez ce que vous possédez et donnez-le en aumône ! »
Il n’y a aucune échappatoire à ce que professe Jésus. Il nous engage à viser une richesse d’un tout autre ordre : celle qui ne connaît ni usure, ni destruction, ni perte. Or, nous sommes précisément à la recherche permanente d’un trésor inaltérable capable de nous mettre à l’abri du besoin. Nous nous rendons compte – peut-être un peu confusément – que cette avidité à remplir notre escarcelle va bien au-delà de nos exigences vitales et nous entraine dans une quête qui nous fait perdre le sens du bien commun.
Contrairement aux lois de la nature auxquelles nous sommes soumis, nous ne souffrons ni n’acceptons une existence affectée par une perte de pouvoir sur les autres , par le recours à l’ humilité, par une vulnérabilité et une fragilité confrontées aux concours de circonstance , par une impuissance à faire partie des nomenclaturas de notre époque.
Des sentiments de perte de prestige, de vieillesse, d’isolement, de solitude contribuent à nous jeter dans les bras de bonimenteurs de recettes et de promesses .
Aujourd’hui, notre société s’évertue à nous donner bonne conscience. Elle nous propose un éventail de traitements au cas par cas insidieusement présentés comme un savoir-vivre essentiel. Elle se veut garante d’une panacée capable de faire la chasse au manque, à l’absence, à la dépréciation, aux bourses qui s’ingénient à gérer les découverts, les crédits .
L’argent , la lettre de change, la carte prémium excellence, un ou plusieurs coffres , un plan d’épargne, des assurance-vie constituent autant de moyens qui pénètrent notre vie de tous les jours sans autre implication que celle du paiement d’un taux d’usure. . . La boucle et bouclée : la mise en garde de Jésus reste de nos jours d’une tremblante actualité.
À l’interpellation du « faites-vous des bourses qui ne s’usent point » la société actuelle répond par
” Comment redonner du pouvoir à mon argent…? »
Combien d’organismes ou d’établissements recommandables ne se sont-ils pas efforcés de nous garantir une pérennité à défaut d’ une croissance perpétuelle ?
Combien de chartes et de protocoles ne nous ont-ils pas été proposés en appuyant sur notre sélection et notre exceptionnelle qualité membre bienfaiteur ?
” Redonner du pouvoir à son argent “ …. Revient aujourd’hui à parer votre profil d’une considération apparemment fraternelle et altruiste cachant sous un montage incompréhensible la dépendance, l’assujettissement voire le vol en bande organisée !
Nous sommes bien loin des admonestations et mises en garde radicales perpétrées par Jésus .
Ne sont mis en avant pour justifier l’impérieuse nécessité de conclusion de contrats de vie que des expressions dont le sens est dévoyé : une humilité de service – un sens éthique – une prise de risque – un devoir d’inventaire – une investissement durable – des notions de solidarité – une maîtrise des temps à venir – des cibles potentielles … »
Il s’agit de déculpabiliser et de transformer notre relation à l’argent en la faisant un véritable jouer comme un levier d’autonomie, d’épanouissement et d’impact positif dans une société de citoyens libres et responsables ?…
Qui peut résister à de telles sollicitations dont la présentation est toute affaire de séduction ? Que ce soit du temps de Jésus ou du nôtre, la circulation de la richesse matérielle et son emprise tant sur l’affranchi que sur l’esclave restent omniprésente.
” Redonner du pouvoir à son argent ! . . .” Je me pose cette question :
Pouvons-nous aujourd’hui nous recommander de comportements humains qui répondent à l’enseignement que Jésus a prodigué à ses disciples, qui se sont risqués à se détacher de tous biens, à ne conserver de leurs revenus que le nécessaire , comme Jésus et ses disciples ont dû faire ? . .
Nous n’avons aucun mal à citer des hommes de pouvoir, des présidents, des préfets, des moralisateurs, des présidents d’associations caritatives qui sont partis avec la caisse dans une impunité totale. . ..
Pour mon compte, , j’ai pensé à un homme politique, dont le comportement m’a immédiatement mis en relation avec les propos de Jésus.
Cet homme public a été un leader atypique proche du peuple et porteur d’une exigence de vie. Ancien Tupamaros, adepte de la guérilla urbaine dans son pays, il a été emprisonné pendant 14 ans. Son expérience et son écoute l’ont conduit, après sa libération,à épouser des fonctions de député, puis sénateur, puis ministre et enfin président de son pays.
José Pepe Mujica, tel est son nom, a toujours mené une vie simple, pratiqué l’honnêteté en politique, refusé constamment de jouir des bénéfices et des privilèges attachés à ses fonctions successives. Il a donné l’essentiel de ses salaire et émoluments à des œuvres caritatives. Il a pratiqué une éthique de vie tournée vers la sobriété.
Et que nous dit ce révolutionnaire ( proche des théologiens sud-américains prônant la libération….. ) ?
« Je ne suis pas pauvre,
je ne me soumets pas à l’obligation de gaspiller mon temps à gagner de l’argent.
Je garde la liberté d’être avec les autres.
Il a ajouté :
La seule chose importante est de vivre avec les autres au lieu de suivre un destin naturel, une tradition familiale ou une vie dépourvue de sens.
Tu peux faire quelque chose avec le monde où tu vis.
Prends la vie entre tes mains et construis un projet collectif ! »
Dans une société dominée par la consommation, par la publicité, par la quête de croissance, ce message du président uruguayen apparaît subversif. Il s’est opposé à l’idée que le bonheur dépend de l’accumulation et du paraître, il invite à la résistance douce, à la sobriété volontaire et au recentrement sur l’essentiel. Il va même plus loin que Jésus ! . . . Mais là n’est pas l’essentiel : nous rejoignons et comprenons la recommandation du Christ à ses disciples.
Toute action empreinte de bonté, tout pardon accordé, toute fidélité maintenue en dépit des vents contraires, construisent pour chacun le chemin où Jésus souhaite nous entraîner. Ce cheminement personnel imprévisible parce que parsemé de rencontres surprenantes constitue la seule sécurité véritable. Ces rencontres nourrissent notre quotidien en accordant du temps à l’écoute et au partage plutôt qu’à la course aux possessions.
” Faites-vous un trésor inépuisable dans les cieux ! “ nous dit Luc au chapitre 12
” Ne pas gaspiller son temps à gagner de l’argent ! “ nous rappelle le Pepe Mujica.
AMEN
Prochain culte
dimanche 17 août
10h30