Atelier de Lectures Oecuménique du 20 octobre 2022
Geneviève Guyot présente le livre de Kahina BALHOUL: Mon Islam, ma liberté. (Edition Albin Michel 2021)
En complément, un document présente la mosquée Fatima, association cultuelle créée par cette Imame.
Préalable : Je ne suis pas une spécialiste de l’islam ; j’ai lu et découvert avec beaucoup d’intérêt ce livre qui m’a appris beaucoup de choses sur cette religion dont la perversion par des fondamentalistes violents est dénoncée fortement par l’autrice. Elle revient aux sources de sa religion et adhère à la spiritualité soufie qui donne la prépondérance à l‘attitude intérieure, à la recherche de la connaissance de Dieu qui se traduit au quotidien par des actes d’amour. Elle fait une large place à la pensée du philosophe soufi Ibn Arabi dont elle cite de larges extraits dans ce livre. J’ai repris seulement ce que j’en ai compris. J’espère ne pas avoir trahi sa pensée ?
1. Biographie
Kahina Bahloul est la 1ere femme imame en France.
Elle est née en 1979 d’un père kabyle et d’une mère dont les parents étaient l’un français catholique et l’autre juive polonaise. Elle a grandi en Algérie dans sa famille paternelle. Elle était adolescente pendant les années noires de terreur (1991-2002). Adulte, elle vit en France et à 30 ans après le décès de son père elle traverse une crise existentielle et découvre la littérature et la philosophie soufies ; ce fut une révélation.
Elle dit : « C’est dans la spiritualité que j’ai trouvé le vrai sens du message prophétique et coranique ; je ne l’ai trouvé que parce que j’ai erré, douté, questionné ; cela fait partie du chemin ; sans le doute, aucun processus de recherche ne peut être entamé…il renouvelle la foi et la garde vivante et en mouvement … »
Elle devient alors spécialiste de l’œuvre du mystique andalou soufi Ibn Arabi (Murcie-1165/Damas-1240). Elle affirme qu’il faut se réapproprier sa religion après en avoir été dépossédé pendant plusieurs décennies par des idéologies intégristes et fondamentalistes.
Elle s’engage après les attentats de 2015 et fonde en 2019, à Paris, avec des amis musulmans libéraux la mosquée « Fatima » ouverte à tous, hommes et femmes, et aux non-musulmans. Son collègue imam Faker Korchane y alterne les prêches avec elle.
2. L’islam de ses origines
En Algérie elle a vécu l’islam de l’intérieur. Son père et ses grand ’parents paternels le lui ont transmis dans son enfance en Kabylie dans un environnement rural authentique. Pour eux le lien à Dieu s’expérimente et se vit à chaque instant. Ils étaient issus d’une famille maraboutique descendante d’un « wali » (saint musulman) ; cette culture était imprégnée de mystique soufie : chaque individu est responsable et tend à tout moment à réaliser le bien et à lutter contre le mal.
Le saint occupe une place centrale ; il est un être humain accompli et relie le monde terrestre au monde céleste.
Le soufisme s’est développé pendant plus de mille ans au Maghreb dans des voies initiatiques diversifiées au cours d’échanges entre Moyen-Orient et Occident.
A l’école Kahina reçoit un enseignement religieux jusqu’au bac.
Très jeune, elle a une conscience aiguë de la valeur de la liberté et du combat pour sa conquête. Pour cela elle a engagé un travail de transformation intérieure profonde.
Son père avait fait des études supérieures en Algérie et avait fait un temps de la prison pour avoir défendu avec des amis étudiants, l’identité et la langue berbère. C’est pourquoi il avait choisi le prénom « Kahina » pour sa fille. « La Kahina » est une figure mythique de la résistance à l’oppression de la fin du VIIe siècle : reine, prêtresse et guerrière, elle avait lutté jusqu’à la mort, l’épée à la main, contre l’invasion des Arabes Omeyades.
Kahina Bahloul affirme : « Tout peuple a besoin d’un récit fondateur. Plus un arbre est enraciné dans la terre où il a germé, plus il est fort et mieux disposé à épanouir ses branches et ses feuilles vers l’extérieur. Mieux un individu connait son histoire et celle de ses ancêtres, plus il est solide et capable de s’ouvrir à l’altérité qui l’entoure. A l’inverse, la fragilité née du sentiment d’être un déraciné amène le repli sur soi car le monde extérieur est sans cesse perçu comme un danger potentiel. Ce sentiment explique en partie le besoin ressenti par certaines jeunes personnes de vouloir se protéger de l’altérité en adoptant un comportement de fermeture et de repli. »
3. Un peu d’histoire
En Afrique du Nord, les berbères ont repris le pouvoir après la conquête arabe dès le Xe siècle. 1ere dynastie : Les Zirides ont fondé Alger.
XI e siècle 2e dynastie : les Almoravides (1055-1145) période de progrès culturels, sociaux, politiques et religieux.
aux XIIe et XIIIe siècles Les Almohades ( 1147-1269) puis les Mérinides( 1248-1465)
Ils ont régné jusqu’au XVIe siècle sur le Maghreb et l’Espagne.
1979 est l’année de la naissance de Kahina Bahloul et c’est l’année où en Iran Khomeiny a pris le pouvoir. Les religieux ont la haute main sur le politique. C’est la montée de l’islamisme radical et des tensions identitaires.
« En Algérie un déficit de maturité politique et sociale après 17 ans d’indépendance était et reste encore à conquérir. »
4. Pour une réforme aujourd’hui
L’islam dans sa réalité est d’abord une spiritualité, une sagesse qui alimente la foi de milliers de personnes dans le monde avec pour but de trouver la paix en eux-mêmes et la voir advenir dans le monde.
La pensée réformiste musulmane existe depuis le 19e siècle (et même au 17e). Mais ce courant n’a pas rencontré le même succès que le fondamentalisme, le soutien financier des monarchies pétrolières lui ont fait défaut.
Il y a deux mouvements réformistes : ceux qui voient en l’autre une source d’enrichissement et d’inspiration et ceux qui y voient un risque de corruption et veulent faire revivre un âge d’or fantasmé de l’islam (wahabisme, salafisme etc…)
Les pensées éclairées de l’islam sont méconnues en Occident. Un penseur comme l’Egyptien Nasr Abu Zayd (1943-2010), professeur au Caire a dû s’exiler ; il poursuivait deux buts : reconnecter les études coraniques avec la critique littéraire et définir une compréhension objective de l’islam.
Les musulmans méconnaissent leur religion car c’est une religion de la modernité, de culture. Mohammed Abduh (1849-1905) est le père de la pensée islamique moderne. Il dit : – « retournons aux sources et tentons de comprendre notre religion à nouveau ». Le professeur universitaire kabyle Mohammed Arkoun (1928-2010) est le père de l’islamologie appliquée. Il cherche à renouer avec la tradition des penseurs libres en Islam. Il récuse toute manipulation des textes religieux à des fins idéologiques. Il insiste sur l’importance de voir la religion comme un espace socio-historique dont la connaissance doit passer par les sciences humaines et sociales.
Dans les débuts de l’islam, fin 8e s., les divers savoirs religieux étaient animés d’un fort dynamisme ; en particulier, on octroyait aux savants de cette époque une immense liberté leur permettant de décider que tel ou tel verset coranique n’avait pas de valeur juridique par ce qu’il avait été abrogé par tel autre verset. Cette liberté de l’abrogation a ensuite été bridée…
Au cours de l’histoire on voit que chaque fois que la religion a été instrumentalisée par le pouvoir politique, cela a abouti à des conséquences dramatiques sur le plan humain et au dévoiement du message spirituel sur le plan religieux.
Renouer avec l’usage de la raison et la libre pensée sont des recommandations du Coran. Le courant libéral a pour objectif une double harmonie : harmonie avec le sens de la révélation coranique et harmonie avec l’esprit de notre époque.
Nous devons proposer une réforme de la pensée dans différents domaines de la théologie, de la jurisprudence, de la philosophie et remettre la spiritualité et la mystique au cœur de notre vécu religieux.
Des réformes sont nécessaires : abolition de l’esclavage partout dans le monde ,mise en œuvre de législations égalitaristes entre les genres (égalité d’héritage, de témoignage, droit au divorce, abolition de la tutelle sur les femmes, abolition de l’obligation de porter le voile, autorisation du mariage des musulmanes avec des non musulmans) ; de même il faut abolir toute forme de discrimination ou de séparation entre les hommes et les femmes lors des offices religieux et dans la vie profane.( les femmes peuvent occuper le poste d’imame comme les hommes).
Concernant le statut du texte coranique, nous devons intégrer les apports des sciences humaines et sortir du dogme du Coran incréé qui empêche toute possibilité d’analyse historico-critique.
Elle dit : « Dieu n’a pas parlé une fois pour toutes à une génération morte avant de se taire à jamais. Il continue de nous parler jusqu’à la fin des temps ; à nous de réactualiser notre regard et notre compréhension des textes sacrés. La révélation est toujours en marche à chaque époque, chaque génération doit faire parler le texte et dialoguer avec lui en fonction de son propre contexte intellectuel et social. ».
« Il est possible d’embrasser la modernité par un islam ouvert et précurseur qui affirme la concordance entre la tradition, la foi, ses principes et le monde dans lequel nous vivons. Un islam qui accorde à la connaissance une place prépondérante, car la connaissance est nécessaire à la conscience, la compréhension est indispensable à l’observance des rites. »
5. Le féminisme est un humanisme
Depuis son plus jeune âge, Kahina est révoltée contre l’injustice et plus particulièrement celle faite aux femmes. Elle a compris que cette injustice contre les femmes dans la société ne pouvait être que le produit d’une œuvre humaine.
Dans sa quête spirituelle elle a découvert une notion centrale de la mystique musulmane : l’être humain sans distinction de genre a pour responsabilité de succéder à Dieu comme un collaborateur. Il a pour mission de préserver et de défendre l’intégrité et la dignité de ses semblables et de toutes les créatures.
La fragilité est partout dans la création y compris chez l’homme. Cela passe par la reconnaissance de la part féminine dans l’homme.
Elle éprouve gratitude et reconnaissance pour les grandes figures féministes mais elle ne veut pas faire du féminisme une cause à part des autres causes humanistes ; c’est d’abord l’injustice qui la révolte qu’elle qu’en soit la cible. En effet isoler la cause féministe des combats humanistes est souvent un prétexte pour la disqualifier.
D’autre part, elle constate que les religions portent une lourde responsabilité dans la construction de la supposée infériorité des femmes.
Elle dit :« Quand le Coran parle de la création d’Adam, c’est d’un être humain androgyne où le féminin et le masculin sont unis dans une même essence. »
La Rabin, Delphine Horvilleur dit la même chose.
Elle cite Ibn Arabi : « Le microcosme contient en lui tout le macrocosme ; tous les caractères dans l’univers se retrouvent dans l’être humain. »
Autour de la question du voile elle dit :
C’est Tariq Ramadan avec l’idéologie des frères musulmans qui a édicté un postulat malhonnête disant que le voile était une obligation religieuse pour les femmes. Certaines féministes assimilent le voile à un acte de foi et en font un symbole identitaire de citoyenneté religieuse. C’est une manipulation de l’opinion publique par l’islam politique qui fait du corps de la femme une question politique qui doit être gérée par la collectivité en la dépossédant de sa liberté individuelle d’être humain.
6. Le ministère religieux féminin
L’imam est un guide religieux : il dirige la prière du vendredi et prêche ; il donne des conseils religieux, accompagne la prière mortuaire et célèbre les mariages etc…Avant tout l’imam est un modèle pour les croyants sans distinction de genre. Il y a de grandes figures féminines dans l’histoire qui sont des modèles pour les musulmans telles Marie mère de Jésus, La reine de Saba, Asiya, Sarah, Hajar …
Actuellement il y a des femmes imames dans le monde : en Afrique du Sud, aux USA, au Canada, en Europe, et elles ont toutes suscité de vives réactions car la lecture du Coran et de la Tradition par des hommes a pris le pas sur le message de Dieu qui est lui-même juste dans son essence.
Pour les fondamentalistes, le corps de la femme est devenu une obsession. Ils veulent la faire disparaitre de l’espace public. On constate alors une nette régression et la dégradation des rapports entre les genres.La mixité a toujours existé dans les lieux saints de l’islam. L’imanat féminin a été défendu par des juristes musulmans à différentes époques.
En particulier par Ibn Arabi qui affirme qu’une femme peut exercer la fonction d’imame et devant une assemblée mixte.
En conclusion elle ajoute : « les avis qui veulent établir l’interdiction absolue du magistère féminin dans le culte musulman n’ont pas de fondements théologiques solides. La lecture du Coran à travers le prisme patriarcal a abouti au démantèlement du message coranique et de sa vision égalitaire du monde…Ce texte sacré pourrait être interprété comme le meilleur instrument de lutte contre la discrimination, à condition que les femmes soient convaincues qu’elles sont légitimes à s’approprier la question théologique avec leurs égaux et frères, les hommes. »
7. Le voile et ce qu’il voile
Elle dit :« Pour les Islamistes, les femmes ne sont dignes de respect que si elles sont silencieuses, obéissantes, voilées, calfeutrées dans leur domicile ou à la mosquée, mères de famille, enceintes tous les ans procréant des garçons, grâce à Allah ».
« Ils utilisent une rhétorique bien rodée ponctuée de versets coraniques et de citations attribuées au Prophète pour s’envelopper du manteau du sacré. Tout cela pour endormir la vigilance de l’auditoire et le rendre perméable à toutes sortes de manipulations. »
Le Hijab apparu en 1990 en Algérie est synonyme pour l’autrice de terreur et d’oppression. Il est entaché de sang, de haine et d’exclusion.
Elle explique que le Coran appelle les femmes à une juste pudeur et n’évoque en aucun cas l‘obligation de se couvrir la tête ou les cheveux.
Elle fait d’ailleurs un rappel historique sur le port du voile dans l’antiquité chez différents peuples comme les Babyloniens, les Assyriens, les Grecs etc …
Le voile n’est pas un symbole religieux ni un étendard politique. Mais la propagande islamique a réussi à l’imposer comme la norme de l’islam.
Cependant, pour sa part, elle respecte la liberté individuelle de chaque femme dans le choix de ses vêtements.
8. pour un islam spirituel
Le formalisme actuel nous fait croire que l’islam aurait toujours présenté un seul visage. Il y a toujours eu deux tendances opposées dans l’histoire de la pensée musulmane :
-une approche inclusive citant des versets appelant au respect et à la reconnaissance des autres religions
– une approche exclusive usant de versets rigoristes qui critiquent les autres croyances ou incroyances.
Cette question du pluralisme religieux l’a préoccupée dès son plus jeune âge en raison de son histoire familiale. Elle s’est donc attelée à identifier et à étudier les penseurs de l’islam qui se sont exprimés en faveur du pluralisme et du salut universel.
La plupart était de mystiques soufis. Dans la vision libérale, ce qui est primordial est l’expérience individuelle et une approche non dogmatique de la religion qui prône amour et compassion avant tout.
En particulier Ibn Arabi dit : « Le prophète Muhammad lui-même portait une attention particulière aux relations avec les adeptes des autres religions et était intransigeant quant à leur respect de la part des musulmans : « quiconque fait du mal à un chrétien ou à un juif, sera mon ennemi le jour du jugement. »
Il va même plus loin en proclamant la nécessité de la diversité religieuse. Le but de la religion étant la réalisation de la perfection humaine avec la guidance des prophètes pour acquérir une vraie connaissance de Dieu.
9. l’unicité, une attitude spirituelle
D’après Ibn Arabi, l’être humain fait partie de l’univers et ne peut se contenter d’un regard extérieur sur lui. La connaissance objective doit intégrer la connaissance subjective c’est-à-dire une connaissance lucide de soi, de la nature humaine et sa place dans le cosmos.
La notion de l’Unicité divine va entrainer une vision pluraliste des religions. En effet le message : « Point de divinité en dehors de Moi. Adorez-moi donc », est commun à tous les prophètes avant et après Muhammad.
Dieu est « l’Expérimenté » car il a l’expérience parfaite du monde parce qu’il connait chaque chose selon son essence réelle ; en retour le monde dont l’homme fait partie, fait l’expérience de Dieu en devenant conscient de son existence étant emporté par le souffle du « Miséricordieux ». Ce souffle qui émane de Dieu amène le monde à son existence et le maintient comme le souffle vital maintient notre corps en vie.
Dieu, l’être nécessaire, est le seul existant ; toute chose emprunte à Dieu son existence de manière temporaire pour être là, dans le monde manifesté, avant de se fondre à nouveau dans sa source, le « Réel ».
Dieu est non délimité par quoi que ce soit mais il est aussi libre de toute délimitation et de toute détermination. Paradoxalement il possède donc aussi toutes les limitations. Il y a une similarité entre nous, qui sommes occupés à nous trouver nous-mêmes, à trouver les autres et à éprouver notre existence, et Dieu qui est l’Existant qui se trouve par essence.
Les noms de Dieu expriment à la fois l’incomparabilité et la similarité avec l’homme qui devient pleinement serviteur et lieutenant lorsqu’il réalise sa relation avec le Créateur.
10. Les signes et les attributs de Dieu
Dans le cosmos, toute chose est signe de Dieu. C’est le livre de Dieu donné aux gens capables de le lire. « Les signes sont supérieurs aux preuves car ils sont rattachés à la foi …tandis que les preuves sont attachées à la compréhension rationnelle qui n’est pas exempte d’obscurcissements. ..L’être est une seule réalité qui se perçoit selon différentes modalités ».
La connaissance de Dieu se fait aussi par les sources scripturaires du Coran et par les autres Ecritures dont Ibn Arab reconnait la validité.
Seul Dieu possède les attributs pleinement et vraiment : La Vraie Vie, le vrai Savoir, le Vrai Désir, le Pouvoir…mais les choses manifestent certains aspects de ces attributs car elles sont dans le cosmos. Toutefois les êtres humains ne manifestent pas tous ces attributs dans la même mesure ; la voie soufie est celle de l’acquisition des qualités de Dieu.
L’Apparent et le Caché sont aussi des qualifications de Dieu dans le Coran. Il n’y a pas d’antagonisme mais complémentarité selon le principe de L’Unicité de Dieu.
Le Coran valorise la foi et la piété intérieure bien plus que la pratique rituelle. Dieu appelle l’être humain à purifier son cœur et à contrôler ses pensées et ses intentions. Il indique que les signes sont à l’intérieur et à l’extérieur de nous-mêmes. Les connaisseurs de Dieu ont foi en lui et le connaissent à travers tous les visages et toutes les formes et ils savent qu’il englobe tout.
L’être humain se situe à la fin de la hiérarchie de la Création, car c’est un microcosme contenant en lui l’ensemble du cosmos. Au départ, les humains reçoivent de façon égale l’insufflation divine qui donne naissance à l’âme ; c’est par la suite que celle-ci est façonnée et influencée par l’éducation, et l’orientation que nous lui donnons.
Le monde et l’ensemble des âmes humaines composent le grand livre de Dieu qu’il faut lire dans sa globalité pour comprendre l’essentiel de son message.
11. La diversité religieuse
Si Toutes les religions affirment l’Unicité de Dieu, chacune apporte son propre enseignement, en fonction du prophète qui s’en est fait le messager, de la langue dans laquelle il a été exprimé et du contexte social et historique de chaque révélation. Le Coran invite les musulmans à croire en tous les livres révélés et en tous les messagers et prophètes. Muhammad, en tant que « sceau de la prophétie » récapitule dans le message dont il est porteur toutes les révélations antérieures. Chaque individu sera à la fin des temps rétabli dans sa nature originelle qui est inaltérable. Cela aboutit à la reconnaissance du salut universel de l’humanité, incroyants inclus.
Pour Ibn Arabi, toutes les religions révélées sont des lumières même s’il reste persuadé de la supériorité de la sienne. Il existe une unité fondamentale dans toutes les Lois Sacrées et chacune détient une part de Vérité. Chaque communauté a un messager. La diversité des religions est due à cette multiplicité des manifestations divines qui ne se répètent jamais.
L’auteur cite l’Emir algérien Abd El Kader (1808-1883) qui est le plus célèbre et le plus fidèle interprète de l’œuvre d’ibn Arabi : « ne demandez jamais quelle est l’origine d’un homme, interrogez plutôt sa vie, ses actes, son courage, ses qualités et vous saurez qui il est. »
12. Conclusion
Le Coran nous parle d’un Dieu qui ne demande pas seulement à être craint et obéi mais aussi et surtout d’un Dieu qui nous aime et qui demande à être aimé. Le mouvement qui donne lieu à l’existence de l’univers est le mouvement de l’amour.
Nous devons faire un travail sur nous-mêmes pour pouvoir nous transformer intérieurement et déployer nos potentialités d’amour autour de nous. Pour cela il faut d’abord se connaitre soi-même. Cela doit nous conduire à la charité universelle C’est pour cela que le Coran recommande de travailler à acquérir les vertus de compassion, de bienveillance, de générosité envers son prochain et envers tous les êtres créés.
Dieu dans son essence nous étant voilé, seule sa connaissance à travers les êtres créés nous est possible. Ainsi l’amour de Dieu passe par l’amour de ses créatures, car elles expriment et manifestent toutes quelque chose de son existence.

Qui sommes-nous ?
La Mosquée Fatima
L’association La Mosquée Fatima est le résultat de la réunion de deux compréhensions de l’islam, l’une spirituelle, l’autre rationnelle. La première est portée par Kahina Bahloul, la seconde par Faker Korchane.
Kahina Bahloul est islamologue et présidente de l’association Parle-moi d’islam qui a pour objet de faire redécouvrir les valeurs de paix, de fraternité et le message universel de l’islam. Faker Korchane est président de l’Association pour la renaissance de l’islam mutazilite (ARIM). Cette organisation a pour objectif de permettre aux musulmans (mais pas seulement) de redécouvrir le patrimoine théologique et intellectuel islamique, notamment celui en référence au courant théologique mu’tazilite. L’association vise un objectif qui est une triple renaissance : une renaissance intellectuelle, une renaissance culturelle et une renaissance spirituelle.
Nous, Kahina Bahloul et Faker Korchane, désirons qu’enfin, une lecture pleinement libérée et émancipatrice de la religion musulmane puisse s’exprimer pleinement, car non seulement elle montrera que l’islam est une religion dynamique qui sait prendre en charge l’époque qu’il traverse sans changer un atome de ses fondements théologiques et spirituels; mais aussi, et c’est le plus important, qu’enfin des musulmans prennent le texte coranique au sérieux et comme première référence pour comprendre pleinement leur religion. Nous croyons profondément que l’islam est compatible avec les données de la raison et les valeurs de notre temps, sans pour autant que cela influe sur le cœur du message coranique en termes de dogmatique. Celle-ci consiste à croire en l’Unicité de Dieu, en Ses anges, en la prophétie et en la Révélation qui l’accompagne ; et au Jour du Jugement dernier.
Nous prétendons que notre héritage islamique est plein d’aspiration à la justice, de volonté de bien et d’épanouissement personnel et collectif. C’est le sens même de la racine du mot qui constitue le nom de notre religion, islam, provenant de s-l-m, à savoir, pacification. Nous puisons notre compréhension de la religion musulmane dans deux grandes tendances historiques : l’une s’appuyant sur l’apport de la théologie rationnelle mu’tazilite qui a grandement contribué a l’âge d’or abbasside ; l’autre, sur la théosophie akbarienne, du grand maître soufi Muhyiddin b. Arabi (m. 1240), aussi surnommé al-sheykh al-akbar « Le plus grand maître ».
C’est en référence à ces deux grandes sources que nous avons fondé avec d’autres personnes motivées par les mêmes objectifs, l’association cultuelle La Mosquée Fatima. Ceci notamment dans le but d’ouvrir une mosquée qui serait le porte-voix de cette compréhension de l’islam, qui formerait une sorte de « coalescence » spirituelle, véritable énergie qui peut contribuer à répondre, selon nous, aux quêtes de sens et de spiritualité qui marque notre ère contemporaine marquée par la désillusion des grandes idéologies, mais aussi par l’instrumentalisation ultracapitaliste,tueuse des valeurs humanistes et dévoreuse des ressources limitées de la planète.
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